Risque

Transport de Matières Dangereuses (TMD)

1. Le risque à La Réunion

Historique des événements

Retour sur un événement marquant : le 25 juillet 2020

Le 25 juillet 2020, un navire japonais, le MV Wakashio contenant près de 3 800 tonnes de fioul et 200 tonnes de diesel s’échoue au large du sud-est de l’île Maurice situé à environ 230 kilomètres de l’île de La Réunion. Avec un plus de 1 000 tonnes d’hydrocarbures s’échappant du navire, les autorités réunionnaises ont déployé une cellule de crise importante à partir du 6 août 2020. Au final, la pollution est restée localisée sur les côtes mauriciennes et n’a pas atteint l’île de La Réunion.

Hormis ce naufrage, il n’existe aucun autre exemple significatif d’accident lié au transport de matières dangereuses dans le département.

Photo - MV Wakashio échoué au large de l'île Maurice (Source : Mauritius Broadcasting Corporation).

MV Wakashio échoué au large de l’île Maurice (Source : Mauritius Broadcasting Corporation).

Définition du risque

Le risque lié au Transport de Matières Dangereuses (TMD) implique un potentiel accident lors du transport de ces matières, par voie routière, ferroviaire, fluviale, aérienne, maritime ou par canalisation.

Une matière dangereuse, de par ses propriétés physiques, chimiques ou par la nature des réactions qu’elle est susceptible de provoquer, peut présenter un danger grave pour l’homme, les biens et l’environnement. Elle peut être inflammable, toxique, explosive, volatile ou encore corrosive et être présente dans de nombreux produits du quotidien, comme les carburants, les gaz ou les engrais. Ces matières peuvent être transportées sous forme liquide (exemples : chlore, propane, soude, etc.) ou solide (exemples : explosifs, nitrate d’ammonium, etc.).

IMPORTANT

Il est à noter que les canalisations de transport sont considérées comme des installations fixes. On parle de « risque fixe » contrairement au risque lié aux transports modaux (routiers, ferroviaires, maritimes et fluviaux), considérés comme « risque mobile ».

Les canalisations sont considérées comme le moyen le plus sûr et le plus économique de transport de matières dangereuses (à l’exception des supertankers sur de très longues distances).

Le TMD par canalisations consiste à déplacer, de façon continue ou séquencée, des fluides ou des gaz liquéfiés. Il peut s’agir de gaz naturel (gazoducs), d’hydrocarbures liquides ou liquéfiés (oléoducs, pipelines).

Les types d’effets rencontrés lors d’un accident de TMD

  • l’explosion : provoquée par un choc causant une étincelle, par l’échauffement d’une cuve de produit volatile ou comprimé, par réaction chimique ou par l’allumage inopiné d’artifices ou de munitions. L’explosion peut avoir des effets à la fois thermiques et de surpressions. Les effets peuvent être ressentis à proximité du sinistre ou jusque dans un rayon de plusieurs centaines de mètres. De tels dégâts peuvent paralyser les infrastructures de transport et endommager les industries à proximité, impactant ainsi directement l’économie locale ;
  • l’incendie : causé par l’échauffement anormal d’un organe de véhicule, un choc causant une étincelle, l’inflammation d’une fuite sur une citerne ou un colis contenant des marchandises dangereuses, un sabotage, etc. Un tel incendie peut engendrer des brûlures pouvant être aggravées par des problèmes d’asphyxie et d’intoxication ;
  • la contamination de l’environnement : en se propageant dans l’air, l’eau et/ou le sol, les matières dangereuses peuvent être toxiques. Selon la concentration des produits et la durée d’exposition, les symptômes varient d’une simple irritation de la peau et de la gorge, à des atteintes graves (asphyxies, oedèmes pulmonaires). Des effets notables sur l’approvisionnement en eau potable, les activités liées à l’exploitation de ressources naturelles (pêche, agriculture, etc.) et sur les écosystèmes peuvent également être enregistrés. Ces effets peuvent être ressentis jusqu’à plusieurs kilomètres du lieu du sinistre.

Le risque dans le département

À La Réunion, le risque de TMD est identifié sur les parcours empruntés, qu’il s’agisse de voies routières, maritimes ou de canalisations. Du fait de l’insularité du territoire, de nombreux ravitaillement sont réalisés par voies maritimes et par canalisations, contribuant à une augmentation du risque accidentel, en exposant directement (incendies, explosions, etc.) et indirectement (pollution) le département aux conséquences de ce type d’accident.

    Le risque « mobile »

    Les principaux transports de matières dangereuses « mobiles » concernent les transports routiers et maritimes transportant des produits pétroliers en citerne, des bouteilles de gaz, des alcools et de nombreux colis de matières dangereuses au sein de chargements hétérogènes.

    Le risque « fixe »

    Comme précisé plus haut, les canalisations de transport de gaz ou d’hydrocarbures sont soumises à une réglementation spécifique (articles L. 554-5 et suivants du Code de l’environnement).

    Les principales canalisations de transport de matières dangereuses (oléoducs) se situent entre les ports est et ouest de La Réunion avec le dépôt d’hydrocarbures de la SRPP et la liaison entre le dépôt AVIFUEL et l’aéroport Roland Garros.

    Le parc à conteneurs du Grand Port Maritime de La Réunion est également concerné par la réglementation en matière d’infrastructures TMD, en raison des quantités importantes de marchandises stockées et de ses activités encadrées par un règlement local portuaire.

    Carte des axes et points sensibles de TMD à La Réunion.

    Carte des axes et points sensibles de TMD à La Réunion.

    2. Les actions pour prévenir le risque

    Les outils de surveillance et de prévention

    Stratégie globale de prévention et de gestion du risque

    La réglementation liée au TMD vise à prévenir les risques pour les personnes, les biens et l’environnement. Afin de permettre la circulation sécurisée des marchandises dangereuses entre les pays, la réglementation TMD est à visée internationale. La directive 2008/68/CE du Parlement européen rend obligatoire l’application de l’ADR, du RID et de l’ADN (voir ci-dessous) à l’intérieur des États membres.

    Cette réglementation repose sur différents règlements nationaux et internationaux, dont la liste non-exhaustive est exposée ci-dessous :

    Tableau - Principales règlementations relatives au TMD (Sources : Cabinets conseil ADVISEOS et SOEC, Organisation intergouvernementale pour les Transports Internationaux Ferroviaires (OTIF), INRS)

    Principales règlementations relatives au TMD (Sources : Cabinets conseil ADVISEOS et SOEC, Organisation intergouvernementale pour les Transports Internationaux Ferroviaires (OTIF), INRS)

    La connaissance

    La loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 a introduit dans le Code de l’environnement l’obligation de rédaction d’Études De Dangers (EDD) pour les ouvrages d’infrastructures routières, ferroviaires, portuaires, de navigation intérieure ou les installations multimodales pouvant présenter de graves dangers de stationnement, de chargement ou de déchargement de matières dangereuses (aires routières de stationnement, gares de triages, ports, plateformes multimodales, etc.). Les dispositions spécifiques sont définies au sein des articles L. 551-1 et suivants du Code de l’environnement.

    Le risque de TMD ne concerne pas exclusivement des installations fixes (comme les réseaux de canalisations par exemple), les documents décrivant la cargaison et les consignes de sécurité doivent être présents sur le produit, mais également à bord des différents moyens de transport de la matière dangereuse.

    Pour les canalisations de transport, un balisage au sol est mis en place à intervalles réguliers et de part et d’autre des éléments spécifiques traversés (routes, autoroutes, voies ferrées, cours d’eau, plans d’eau, etc.).

    Pour le transport routier, maritime et ferroviaire (vrac ou conteneur), les TMD sont signalés, à l’extérieur, par des panneaux rectangulaires oranges et des plaques-étiquettes losanges avec diverses couleurs et différents logos.

    Les classes de marchandises dangereuses de l’ADR, exposées en page suivante (voir ci-dessous), identifient les chargements (matières explosives, gazeuses, inflammables, etc.). Il est donc important de connaître la signalisation, les symboles et les bons réflexes à appliquer face à chaque type de marchandise.

    Chaque chargement est identifié par des plaques oranges normalisées, affichant :

    • le code danger : permettant de connaître les caractéristiques de la matière (composé de deux ou trois chiffres, allant de 0 à 9). La répétition d’un chiffre indique une intensification du danger ;
    • le code matière : permettant de désigner l’identification internationale de la matière transportée (numéro ONU) ;
    • le pictogramme : représentant le danger principal lié à la matière.
    Tableau - Identification des chargements de TMD.

    Identification des chargements de TMD.

    Tableau - Les étiquettes de danger de l'ADR (Source : INRS).

    Les étiquettes de danger de l’ADR (Source : INRS).


    La prévision et la surveillance

    Le risque TMD est particulièrement imprévisible puisque dépendant de nombreux facteurs (comportements des chauffeurs et des autres usagers, défaillances techniques, etc.), les actions visant à réduire le risque à la source sont les plus pertinentes. À La Réunion, la bonne application de ces règles est surveillée sur terre et en mer.

    • Sur terre :

    La DEAL procède à des contrôles, à tout moment de la journée ou de la nuit, en semaine ou en week-end, afin de vérifier que les véhicules respectent bien les différentes réglementations. Ces contrôles portent sur :

    la réglementation des transports : inscription au registre, licence, lettre de voiture, attestation de formation des conducteurs (FIMO/FCO) ;

    la réglementation sociale européenne : respect des temps de conduite et de repos ;

    le code de la route : validité du contrôle technique et du chronotachygraphe, bon fonctionnement de certains équipements (éclairage, limiteur de vitesse, etc.), état des pneumatiques, respect de la limitation de vitesse, respect de la charge maximale, etc. ;

    la réglementation sur le transport des matières dangereuses : existence et validité du certificat d’agrément ADR, habilitation du conducteur, etc… ;

    le code du travail : travail déclaré.

    Les infractions constatées font l’objet soit d’amendes forfaitaires, soit de procès-verbaux transmis au procureur de la République. Dans certains cas, le véhicule peut être immobilisé jusqu’à cessation de l’infraction. Les entreprises particulièrement infractionnistes sont convoquées devant la Commission Régionale des Sanctions Administratives (CRSA) qui propose au préfet les sanctions administratives adaptées (immobilisation de tout ou partie du parc de l’entreprise sur une période donnée, retrait provisoire ou définitif des titres de transport).

    Enfin, le Plan de Surveillance et d’Intervention (PSI), mis en place par l’exploitant, définit les dispositifs de surveillance, d’alerte, d’intervention et de gestion de crise en cas d’accident sur des canalisations de TMD.

    • En mer :

    Afin de prévenir les risques liés à la navigation maritime (événements de mer, pollution du milieu marin et du littoral…), le CROSS exerce la mission permanente de surveillance de la navigation maritime et recueille les informations sur les pollutions maritimes. Il exploite ces informations, assure leur retransmission, et concourt à la recherche des auteurs d’infractions sous le contrôle de l’autorité judiciaire. La surveillance des pollutions, traditionnellement axée sur les pollutions par hydrocarbures, s’étend désormais à celui des émissions atmosphériques des navires (vérification de la conformité des taux de soufre et d’oxyde d’azote notamment).

    Les dispositifs spécifiques POLMAR définissent l’organisation française de lutte contre les pollutions accidentelles marines (par hydrocarbures ou autres produits chimiques). Ils s’appuient sur un ensemble de textes officiels et constituent depuis 2005 un volet spécifique des Dispositifs Spécifique ORSEC (DSO). Le DSO maritime POLMAR s’adresse aux organismes en charge de la lutte antipollution et doit être révisé tous les cinq ans. Dans le cadre de ce document, la diffusion de l’alerte à la population est définie comme suit :

    L’alerte parvient en premier lieu au CROSS. Le cas échéant, il appartient à l’organisme ou l’unité recevant l’alerte ou décelant une anomalie (capitainerie, navire, aéronef ou centre opérationnel) d’en informer sans délai le CROSS, qui rend compte au Commandant de Zone Maritime (CZM).

    La prise en compte du risque dans l’aménagement

    La réglementation

    De manière générale, aucune mesure de maîtrise de l’urbanisation n’est prévue pour protéger les espaces vulnérables des risques liés au TMD, à l’exception du TMD par canalisation. Pour ce mode de transport, des Servitudes d’Utilité Publique (SUP) sont prévues depuis 2012 par la réglementation et visent à encadrer strictement la construction ou l’extension d’Établissements Recevant du Public (ERP) et d’Immeubles de Grande Hauteur (IGH) * à proximité des canalisations. Toutefois, elles n’imposent pas d’autres contraintes d’urbanisme pour les autres catégories de construction.

    * Immeubles de Grande Hauteur (IGH) : Constitue, selon l’article R. 122-2 du Code de la construction et de l’habitation, tout corps de bâtiment dont le plancher bas du dernier niveau est situé par rapport au niveau du sol le plus haut utilisable pour les engins de secours et des services publics : à plus de 50 mètres pour les immeubles d’habitation et à plus de 28 mètres pour tous les autres.

    En application du décret n° 2012-616 du 02 mai 2012, lors de la création d’une canalisation, le préfet communique, pour avis, la demande de création aux communes concernées ainsi que les inconvénients engendrés par la canalisation. Une enquête publique peut également être diligentée par le préfet. Si la compétence en matière d’urbanisme est exercée par un Établissement Public de Coopération Intercommunale (EPCI), celui-ci est consulté en lieu et place des communes concernées. Par l’arrêté NOR : DEVP1306197A du 05 mars 2014, trois zones de sécurité autour des canalisations sont créées en fonction de la dangerosité du produit transporté, définissant différentes distances de sécurité par rapport à l’axe de la canalisation :

    Tableau - Zones de sécurité autour des canalisations et règles d'urbanisme associées (Source : mementodumaire.net).

    Zones de sécurité autour des canalisation et règles d’urbanisme associées (Source : mementodumaire.net).

    Pour les autres modes de transport (routier, maritime, etc.), cette problématique est généralement traitée à travers les documents d’orientation tel que le Plan Local d’Urbanisme (PLU). En effet, le Code de l’urbanisme impose la prise en compte de ce risque dans les documents d’urbanisme. Si les projets d’aménagements (ERP de moins de 100 personnes, particuliers, entreprises, etc.) ne sont soumis à aucune contrainte, le maire est toutefois chargé d’informer le transporteur de tout permis de construire ou certificat d’urbanisme délivré dans la zone « SUP 1 ».

    Les mesures de protection collectives

    En raison de l’étendue des surfaces potentiellement menacées par un accident, de la diversité dans les modes de transport et de la nature du risque, l’information, la prévention (inspection des installations, contrôles réguliers, etc.) et l’organisation de l’alerte et de l’évacuation sont privilégiées.

    Où se renseigner ?

    ➔ Informations générales :

    ➔ Les réglementations :

    Les communes concernées

    Carte du risque Transport de Matières Dangereuses (TMD) à La Réunion.

    Picto Cyclone et tempêteLes consignes à respecter

    Transport de Matières Dangereuses (TMD)

    Avant
    • Savoir identifier un convoi de marchandises dangereuses : connaître la signification des panneaux et des plaques d’affichage
    • S’informer de l’existence du risque
    Pendant
    • Baliser les lieux pour éviter tout sur-accident
    • Dans le message d’alerte, préciser si possible :
      – le lieu exact
      – le moyen de transport impliqué
      – la présence ou non de victimes
      – la nature du sinistre
      – les numéros présents sur la plaque signalétique orange
    Après
    • En cas d’irritations, se rincer et se laver
    • Changer de vêtements
    • Aérer le local ayant servi au confinement
    Cas particuliers
    Cas particuliers

    En cas de fuite de produit

    • Ne pas toucher ou entrer en contact avec le produit
    • Quitter la zone de l’accident en s’éloignant perpendiculairement à la direction du vent pour éviter un possible nuage toxique
    • Se confiner dans le bâtiment le plus proche