Rupture de barrage
1. Le risque à La Réunion
Historique des événements
À ce jour, aucune rupture de barrage n’a été recensée sur le territoire.
Définition du risque
Un barrage est un ouvrage artificiel, retenant l’écoulement naturel de l’eau, par le biais de la création d’une retenue.
Un barrage peut posséder plusieurs fonctions, parfois complémentaires : la régulation de cours d’eau (écrêteur en période de crue ou favorisant le maintien d’un niveau minimum des eaux lors d’épisodes de sécheresse), l’irrigation des cultures, l’alimentation en eau des villes, la production d’énergie électrique, la retenue de rejets de mines ou de chantiers, la lutte contre les incendies, etc.
On distingue trois principaux types de barrages, selon leur principe de stabilité :
Les différentes formes de barrages (Source : EDF).
Depuis le décret n° 2015-526 du 21 mai 2015, les barrages sont répertoriés selon 3 classes (A à C) contre 4 classes (A à D) auparavant (décret n° 2007-1735 du 11 décembre 2007) :
- Classe A = Hauteur ≥ 20 m et K * ≥ 1500 ;
- Classe B = Hauteur ≥ 10 m et K ≥ 200 ;
- Classe C = Hauteur ≥ 5 m K ≥ 20 ou H > 2, Volume d’eau > 0,05 millions de m³ et une ou plusieurs habitations sont présentes à l’aval du barrage, jusqu’à une distance de 400 mètres par rapport à celui-ci.
* K : Le paramètre « K » est calculé à partir de la hauteur H (en mètres) du barrage et du volume d’eau V (en millions de m3) : K = H2 x V0,5.
Le phénomène de « rupture » de barrage :
Le phénomène de rupture de barrage correspond à la destruction partielle ou totale d’un ouvrage, provoquée par :
- un problème technique : défaut de fonctionnement des vannes permettant l’évacuation des eaux, vices dans la conception, la construction ou les matériaux utilisés, vieillissement des installations, etc. ;
- un facteur naturel : séismes, crues exceptionnelles, glissements de terrain (soit de l’ouvrage lui-même, soit des terrains entourant la retenue et provoquant un déversement sur le barrage), etc. ;
- l’action humaine : insuffisance des études préalables et du contrôle d’exécution, erreurs d’exploitation, de surveillance et d’entretien ou encore actes de malveillance.
La rupture d’un barrage peut être progressive pour les barrages en remblais (érosion ou fuite à travers l’ouvrage, appelé phénomène de « renard »), ou brutale pour les barrages en béton (renversement ou glissement de plusieurs plots, entrainant une onde de submersion déferlant en aval de l’ouvrage).
Parallèlement aux barrages, différents types d’ouvrages hydrauliques, (canaux, système d’endiguement, etc.) sont également soumis au risque de rupture en cas de problème technique, naturel ou humain (cf : partie « Le risque inondation »).
D’une façon générale, l’onde de submersion, l’inondation et la forte érosion de la vallée découlant d’une rupture de barrage peuvent avoir des conséquences :
- sur le plan humain : blessures, noyade et ensevelissement ;
- sur le plan économique : endommagement ou destruction des habitations, des entreprises, des infrastructures (ponts, routes, voies ferrées, etc.), des cultures, etc. Une rupture de barrage peut également engendrer de fortes répercussions sur la production électrique ainsi que sur l’alimentation en eau ;
- sur le plan environnemental : endommagement ou destruction de la flore et de la faune, pollutions diverses, etc.
Le risque dans le département
À La Réunion, les barrages sont peu nombreux et ne sont pas d’une hauteur importante. Il s’agit de barrages utilisés par EDF pour la production hydroélectrique :
Barrage Takamaka I (hors classe) et barrage Takamaka II (classe B) situés en amont de la rivière des Marsouins.
Par ailleurs, le parc de retenue collinaire est constitué d’environ 1 100 ouvrages de type « retenues collinaires » de dimension modeste (volume entre 300 et 3000 m³). Parmi ces ouvrages, les plus grands sont notamment les retenues des Herbes-Blanches (classe C) et de Piton Marcelin (classe C) situées sur la commune du Tampon et la retenue de Dos d’Ane.
La population du département n’est pas directement menacée par le risque de rupture de barrages. En effet, il existe peu de retenues de taille importante et l’urbanisation est limitée en bas des ouvrages, de ce fait les habitations sont souvent hors d’atteinte. Toutefois, le risque reste présent, en particulier pour les randonneurs qui peuvent se retrouver sur le parcours de l’onde de submersion.
Barrage de Takamaka 2 (Source : EDF).
2. Les actions pour prévenir le risque
Les outils de surveillance et de prévention
La réduction du risque
Elle vise à réduire le danger potentiel présent, en limitant l’intensité et l’occurrence de potentiels phénomènes dangereux. Au même titre que pour les ICPE (cf : partie « Le risque industriel »), la sécurité des barrages relève de la responsabilité des propriétaires et des concessionnaires des ouvrages. Cette responsabilité inclut le respect d’obligations, fixées par l’État et mentionnées dans le Code de l’environnement, notamment dans ses articles R. 214-112 à R. 214-132, et par l’arrêté du 06 août 2018 fixant des prescriptions techniques relatives à la sécurité des barrages.
Parmi ces obligations, les ouvrages de classes A ou B sont tenus de réaliser et d’actualiser des Études De Dangers (EDD) par un organisme agréé, précisant les niveaux de risque, les mesures relatives à leur réduction ainsi que les risques résiduels.
Le contrôle des différentes obligations et mesures de sûreté est réalisé par la DEAL sous l’autorité du préfet pour le barrage classé B Takamaka II et les retenues collinaires des Herbes-Blanches et Piton Marcelin classées C. Ces contrôles doivent être effectués périodiquement selon une instruction gouvernementale.
La prévention
Outre les procédures générales d’information préventive (DDRM, DICRIM, IAL), l’information à la population est également assurée par EDF, afin de sensibiliser les différents usagers (pêcheurs, promeneurs, baigneurs, etc.) au risque de montée brutale des eaux.
La connaissance, la prévision et la surveillance
Pour les grands ouvrages (de classe A ou B), une carte du risque, représentant les zones menacées par l’onde de submersion résultant d’une rupture totale de l’ouvrage, est obligatoire.
Cette carte détermine, dès le projet de construction, quelles seraient les caractéristiques de l’onde de submersion en tout point de la vallée : hauteur et vitesse de l’eau, délai de passage de l’onde, etc. Elle permet d’identifier les enjeux et les points sensibles en vue de l’établissement des différents plans de secours. Ces cartes de zonage n’ont aucune valeur réglementaire et ne peuvent être opposables juridiquement. Elles peuvent être transmises aux communes pour l’élaboration de leurs documents d’information (DICRIM). Suite à la catastrophe du barrage de Malpasset dans le Var le 02 décembre 1959, les analyses des causes de cet événement dramatique ont mis en évidence la nécessité de recourir à une expertise technique pluridisciplinaire pour les grands projets de barrages.
Le Comité Technique Permanent des Barrages (CTPB) est alors créé par le décret n° 66-388 du 13 juin 1966. Suite à la loi sur l’eau et les milieux aquatiques du 30 décembre 2006, il deviendra le Comité Technique des Barrages et des Ouvrages Hydrauliques (CTPBOH). Ce comité est constitué d’experts disposant de compétences techniques particulières dans le domaine des ouvrages hydrauliques (hydrologie, hydraulique, géologie, géotechnique, exploitation des ouvrages, risques naturels, etc.). Il est consulté pour tous les projets de grands barrages (classe A), avant le début des travaux de construction du barrage. Il peut être également consulté pour des ouvrages moins importants, pour des questions de sécurité publique.
Les barrages de plus de 20 mètres et de capacité supérieure à 15 hm3 sont soumis à un Plan Particulier d’Intervention (PPI). Ce plan précise, en cas d’accident sur le barrage, les modalités d’alerte de la population, d’évacuation éventuelle et l’organisation des secours. Ainsi, parallèlement, les caractéristiques de l’onde de submersion sont étudiées pour les zones en aval du barrage (hauteur, vitesse, horaire de passage, etc.) et déterminent des itinéraires d’évacuation et des points de rassemblement.
L’arrêté NORINTA0200103A du 22 février 2002, relatif aux PPI « grands barrages » distingue :
- la zone de proximité immédiate : zone dans laquelle l’onde de submersion arriverait dans un délai incompatible avec l’organisation des secours. Elle doit être immédiatement évacuée par la population, dès le retentissement du signal spécifique (cf : partie « Les moyens d’alerte ») ;
- la zone d’inondation spécifique : zone dans laquelle la submersion serait plus importante que celle de la plus grande crue connue. Les populations sont alertées par les pouvoirs publics au moyen du signal spécifique ou à l’aide de véhicules de pompiers équipés de haut-parleurs ;
- la zone d’inondation : zone dans laquelle la submersion serait plus modérée et comparable à une inondation naturelle commune.
Par ailleurs, les dispositifs de surveillance continue des ouvrages sont capables de détecter les signes précurseurs d’une menace. Cette alerte précoce laisse le temps d’organiser l’évacuation des populations concernées. La surveillance d’un barrage est assurée aussi bien pendant la période de mise en eau qu’au cours de la période d’exploitation. Elle s’appuie sur de fréquentes inspections visuelles et des mesures d’auscultation du barrage et de ses appuis. Si cela apparaît nécessaire, des travaux d’amélioration ou de confortement sont réalisés.
Obligations relatives à la sécurité des barrages (Source : ecologie.gouv.fr).
La prise en compte du risque dans la construction
La réglementation
Le préfet et le maire partagent les actions d’informations semblables à tous les risques et destinées aux citoyens, scolaires, professionnels, etc. Au même titre que pour les sites industriels soumis à la directive « Seveso », les pouvoirs publics doivent organiser, en lien avec l’exploitant du barrage, des campagnes d’informations sur le risque et les consignes de sécurité à tenir. Celles-ci s’adressent principalement aux populations situées dans la zone de proximité immédiate de l’ouvrage.
Les mesures de protection
En raison des faibles fréquences et de l’étendue des zones potentiellement menacées en cas de rupture d’ouvrages, il n’existe pas de mesure spécifique de protection collective à l’aval des barrages. La nature même du risque conduit à privilégier l’information, la prévention (campagnes d’auscultation, inspections régulières, etc.) et l’organisation de l’alerte et de l’évacuation.
IMPORTANT
L’alerte en cas de rupture de barrage est assurée par un dispositif de cornes de brume spécifique :
→ À l’écoute de ce signal, la population doit appliquer les consignes de sécurité et être attentive aux informations communiquées sur l’évolution de la catastrophe ;
→ Pour écouter ce signal, rendez-vous sur : secourisme.net
Le signal d’alerte spécifique aux ouvrages hydrauliques.
Où se renseigner ?
➔ Informations générales :
-
Le risque rupture de barrage : ecologie.gouv.fr / gouvernement.fr
➔ Les ouvrages hydrauliques à La Réunion :
- Site de la DEAL Réunion : reunion.developpement-durable.gouv.fr
➔ La réglementation :
- La radioprotection : cypres.org
Les communes concernées
Carte du risque rupture de barrage à La Réunion.
Les consignes à respecter
Rupture de barrage
- Connaître le signal spécifique en cas de rupture de barrage
- Connaître les points de regroupement, les moyens et itinéraires d’évacuation
- Gagner rapidement les points hauts les plus proches
- Ne pas revenir sur ses pas
- Couper les alimentations de gaz et d’électricité
- Attendre les consignes des autorités avant de regagner son domicile
- Prendre des nouvelles de ses voisins
Au retour dans son habitation
- Aérer
- Désinfecter sols et murs à l’eau de javel
- Chauffer dès que possible
- Ne rétablir le courant seulement si l’installation est sèche